Mourir et naitre en communauté
Un mois et demi que nous sommes ici, au Km48.
Un mois et demi et déjà, nous avons assisté à la mort de 3 personnes… 20, 37 et 47 ans… Tous trop jeunes pour mourir !
Alors qu’en France, la mort est souvent occultée, rejetée … Ici, que ce soit à l’école, dans la communauté ou sur les réseaux, la mort est là devant nous, présentée sans filtre.
Mais si la vie est ici très fragile, en un mois et demi, nous avons aussi vu tant de bébés naitre… Nous rappelant à chaque fois que malgré tout, la vie reprend le dessus !
Les pères Alex et Matia sont connectés aux familles de la communauté au quotidien. Toutes les joies et les peines sont échangées.
Le dernier souffle, pressenti ou soudain
Un soir, les enfants nous racontent. Le papa d’une camarade de la paroisse est sur le point de mourir. Il a notre âge. Le père Alex propose à tous les enfants de la paroisse de lui faire une visite/ une prière en fin de journée. Allongé par terre sur un simple matelas, c’est devant eux qu’il rend son dernier souffle, après avoir agonisé pendant plusieurs jours.
Un autre matin, nous apprenons le décès d’un jeune policier de 37 ans : accident de la route. Brutal. Une famille orpheline. Il avait aidé pas mal de familles du coin dans des démarches administratives dans la commune. Un homme généreux !
Plus tard, nous nous rendons au domicile d’une jeune birmane de 17 ans mariée il y a 6 mois. Son jeune époux a eu un grave accident de moto un mois après leur mariage. Après 5 mois de souffrance, il décède. Nous venons rendre hommage à cet homme chez eux. Le corps est encore là, dans leur maison bambou ; Les personnes souhaitent que nous le voyions. Cadavérique, squelettique, l’odeur du corps déjà en décomposition … nous découvrons une poupée de cire dans ses linges. Nous regardons un peu effrayés l’homme ; les enfants du village, eux regardent cela avec simplicité.
Clairement, la vie occidentale ne nous prépare pas à ce genre de vision … trop choquante certainement !
Naitre en communauté !
…. Et dans cette « scène », une petite cloison en plastique sépare le mort avec un petit bébé de 5 jours qui dort paisiblement.
Car en effet, La vie et la mort se côtoient, se mélangent sans crainte.
Une petite fille est née dans cet univers sommaire, basique, et avec un avenir incertain. Mais quelle joie de pouvoir sentir du positif et des sourires dans tout cela !
Le soutien de la communauté, la dignité des familles
Les communautés locales prennent le temps de rendre hommage au mort. Les proches se rassemblent, intègrent aussi les personnes moins connues ou de passage, comme nous. Chacun va voir le mort et prend un temps avec la famille. Un geste peut se joindre à ce temps : brûler un bâton d’encens, faire une prière. S’élever ensemble quelques instants pour la famille qui reste avec les belles choses vécues avec le défunt.
Que l’on soit bouddhiste ou chrétien, la célébration dure plusieurs jours le temps que le corps soit brûlé ou déposé en terre : une messe, des prières régulières dans la famille, on prend le temps qu’il faut… A chaque personne qui passe, un café ou un repas est servi, cela fait partie des traditions, quelque soit son niveau de vie. Même pauvres, les familles restent dignes et ont la simplicité de demander la contribution de certains proches qui devancent d’ailleurs souvent les demandes : naturellement une solidarité se met en place.
Nous n’avons pas vu de pleurs : ils sont gardés pour le privé. La famille organise avec la communauté une belle procession, une inhumation avec ses vêtements, des jouets, des chaussures, un sac.. tout est laissé au défunt… Une manière de lui souhaiter une « bonne mort », un « bon repos »
Mourir et naître en communauté : nous sommes invités à vivre ces événements ensemble !
Ici la vie est à l’état brut. On vit, on meurt ; cela fait partie du cycle normal des choses. D’ailleurs, le taux de mortalité, tout comme le taux de naissance sont élevés. Les rues grouillent d’enfants qui rient, qui jouent. Mais on sait que la vie peut être courte, fragile.
Les joies et les peines sont là même si les gens d’ici ne les montrent pas de trop : il y a une vraie pudeur face aux émotions, dès le plus jeune âge.
Nous ne sommes pas là pour juger, dénoncer, faire la morale ! Nous vivons tous ces événements, la mort et la naissance, avec eux tout simplement.
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